"Même si la création se fait à l'aide de machines informatiques, le Dj, caché derrière des enceintes couvertes de filets militaires, fait sentir sa présence. Il y a une forte interactivité entre le Dj et les danseurs. L'un comme l'autre créent et improvisent selon l'ambiance, les attentes et les demandes. Tel un shaman, il doit être à l'écoute de son public de "'teufeurs", les sentir, les guider, les fraire vibrer, savoir quand ils ont besoin de reprendre leur souffle. Il joue avec eux, les taquine. Il commence doucement, fait monter la pression et accelère. Puis il les fait languir, s'impatienter jusqu'à ce que cela devienne insupportable.
Les respirations sont haletantes, les poitrines se gonflent. Les bras se tordent et les visages grimacent. Ils secouent la tête couronnée d'une volute de fumée ou la tiennent dans leurs mains, grincent des dents et supplient le Dj de les libérer.
L'atmosphère est pesante, presque étouffante. Certains sifflent, d'autres hurlent "Fait Péter". La tension est presque palpable. Souvent le son est strident. Il "part en spirale", encercle, serre, compresse. Les "teufeurs" sont emportés dans un tourbillon et perdent leur équilibre. Les mâchoires se crispent et les corps se convulsionnent. Ils sont en "pleine montée".
Puis, c'est l'explosion, la libération, la jouissance. Les basses, de nouveau, frappent avec puissance et résonnent dans les estomacs.
Des cris de joie intense fusent ici et là. L'ambiance devient plus légère et calme.
Quelques fois, le Dj ralentit de plus en plus le son, comme s'il n'y avait plus d'essence dans le groupe électrogène qui fournit l'énergie et alimente les platines et les ordinateurs, puis le stoppe net.
La coupure est insuportable car elle marque un retour brutal à la réalité. Soudain, il relance le son avec rage et c'est l'explosion de joie.
Les visages sont rayonnants car la fête continue."
Christiana Gicquel, Sociologue, adhérante à Techno Plus.
Extrait de "10 ans de Techno Plus"