Mis en examen deux ans après le crime
Jacques Fruminet, un récidiviste de 41 ans, a été mis en examen hier dans l'assassinat de Nicole Kritter, en 1998 à Mulhouse. Il est déjà renvoyé devant la cour d'assises pour le meurtre d'une jeune femme à Colmar, commis une semaine après.
NICOLE KRITTER, 41 ans, née Schlosser, mariée et mère d'un garçon âgé de 6 ans en 1998, a disparu le matin du vendredi 13 novembre 1998. A 5 h 30, elle est partie de son domicile, rue Drouot à Mulhouse, pour se rendre à son travail dans un supermarché à Riedisheim où elle devait commencer à 6 h.
Comme d'habitude, elle a parcouru à pied les 300 m qui la séparaient de sa voiture, dans un garage rue de Modenheim. La Peugeot 205 a bien quitté le box ce matin-là, mais Nicole Kritter n'est jamais arrivée à son travail. Le véhicule a été retrouvé abandonné, le siège avant droit en position couchette, rue du Maroc à Riedisheim, le soir du 17 novembre. Le 4 décembre, les plongeurs des pompiers de Mulhouse, qui effectuaient depuis deux jours des recherches sur réquisition de la police, ont repêché le corps de la disparue dans le canal du Rhône-au-Rhin, dans la zone portuaire de Mulhouse, à la limite d'Illzach et de Riedisheim. Emballé dans des sacs en plastique noir scotchés par des bandes adhésives, et lesté de deux plaques d'égout, il reposait par 6 m de fond.
Le soir du 20 novembre, Sylvie Arcangeli était étranglée à Colmar
Entre-temps, le soir du vendredi 20 novembre 1998, un autre crime avait eu lieu à Colmar. Sylvie Arcangeli, 33 ans, qui venait de descendre d'un train de Strasbourg, récupérait sa voiture sur un parking derrière la gare quand elle fut agressée sexuellement, étranglée puis enfermée dans le coffre de son véhicule que l'auteur a ensuite incendié. Là aussi, le siège avant droit du véhicule était en position couchette. Le dimanche suivant, un homme brûlé au visage et aux mains s'est présenté, accompagné de son éducateur et d'un aumônier, au commissariat de Colmar, expliquant qu'il était passé devant le véhicule quand celui-ci avait explosé. S'il effectuait cette démarche, a-t-il raconté, c'est que celui qui lui avait prêté sa voiture, qu'il avait connu en prison, tenait à ne pas être mêlé à une histoire où il n'avait rien à voir. Cet homme au visage brûlé, alors âgé de 39 ans, s'appelle Jacques Fruminet. Après son départ du commissariat, les policiers découvrent son passé : il a d'abord été condamné pour vols par le tribunal aux Forces armées françaises à Landau en 1979, et l'année suivante par le tribunal correctionnel de Metz. Puis, en juin 1981, la cour d'assises des Vosges lui inflige une peine de quinze ans de réclusion pour viol, vol avec violences et coups mortels.
Les experts affirment qu'il ne présente pas d'anomalies mentales
Ce crime-là avait eu lieu le 28 mai 1980, le jour même de la sortie de prison de Fruminet, dans son village d'Evaux-et-Ménil, près d'Epinal. La victime était une voisine âgée de 78 ans, morte asphyxiée. Le 20 février 1990, la cour d'appel de Colmar rajoute quatre ans d'emprisonnement pour vol avec violence et deux ans plus tard, le tribunal correctionnel de Saint-Dié alourdit son casier judiciaire de sept ans pour vol avec violence en récidive et transport d'arme et deux ans d'emprisonnement pour évasion. L'enquête a aussi établi que Fruminet avait commis fin 1991à Colmar quatre agressions sous la menace d'une arme de poing contre des jeunes femmes en voiture. En mai 1998, après de multiples condamnations, Fruminet obtient une libération conditionnelle et trouve une chambre dans un foyer à Mulhouse, où l'éducateur lui a décroché un emploi d'homme d'entretien dans un immeuble de la rue Jean-Martin. Le même dimanche où il s'est présenté au commissariat de Colmar, Jacques Fruminet est arrêté au foyer mulhousien. Il finit par reconnaître avoir mis le feu à la voiture de Sylvie Arcangeli, niant avoir tuée celle-ci, parlant seulement d'un accident. En tout cas, il est mis en examen et écroué pour meurtre et viol en récidive. Le juge d'instruction colmarien Claudine Charre a terminé l'information judiciaire sur ce crime en juillet dernier et le 31 août, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Colmar a renvoyé Fruminet devant la cour d'assises du Haut-Rhin. Les experts psychiatres et psychologues affirment qu'il ne présente pas d'anomalies mentales mais « un déséquilibre caractériel psychopathique majeur suite à une structure perverse de la personnalité ». Ils le présentent comme étant à la merci de pulsions destructrices qui le rendent dangereux envers les femmes et précisent que la récidive est toujours possible. Ces conclusions sont proches de celles des experts qui avaient déposé à son premier procès d'assises dans les Vosges en 1981.
Le corps de Nicole Kritter comportait les mêmes molécules qu'un médicament retrouvé chez Fruminet
A Mulhouse, pendant ce temps, les policiers de la brigade criminelle du commissariat central et de la police judiciaire ont réuni des suspicions contre Fruminet pour l'enlèvement et le meurtre de Nicole Kritter. Ils ont ainsi vérifié plusieurs éléments à charge. Fruminet venait souvent chez une voisine de la victime, ce qu'il a reconnu, comme il a admis connaître Nicole Kritter. Les sacs en plastique noir qui entouraient le corps de la victime sont du même type très particulier qu'il utilisait pour son travail. Il avait aussi, avec un ami, jeté une cuisinière dans le canal, non loin de l'endroit où l'on a retrouvé le corps de la victime. L'autopsie de celle-ci a établi qu'elle avait absorbé - ou qu'on lui avait fait avaler - un médicament comportant les mêmes molécules qu'un autre retrouvé en possession de Fruminet. Une première fois, Fruminet a refusé de parler en prison avec les policiers chargés de l'enquête. Le juge d'instruction Ariane Combarel, en charge du dossier, a également fait appel à une psychologue parisienne spécialisée dans les agresseurs sexuels en série. Mardi, les enquêteurs se sont rendus à Epinal où Fruminet était détenu et l'ont placé en garde à vue. Le juge Combarel a ensuite délivré un mandat d'amener et l'a fait présenter à son cabinet, à Mulhouse hier après-midi. Elle l'a mis en examen pour assassinat et l'a fait écrouer dans la soirée à la maison d'arrêt de Strasbourg. Le procureur adjoint Sonja Loos a juste confirmé hier soir cette mise en examen, indiquant que le magistrat instructeur ne tenait pas à ce que soient rendues publiques les déclarations de Jacques Fruminet. Me Thierry Moser, de Mulhouse, partie civile, avec son confrère colmarien Jean-Michel Paulus, pour les familles de Sylvie Arcangeli et de Nicole Kritter, s'est déclaré soulagé par cette mise en examen qui survient deux ans et trois jours après le crime de Mulhouse, et qui apporte aussi une première réponse de la justice à Jean-Marc Kritter, le mari de la victime.
Le corps de Nicole Kritter avait été retrouvé par 6 m de fond dans le canal, trois semaines après sa disparition à Mulhouse.
Archive Dom Poirier
Jacques Fruminet a déjà été condamné à un total de vingt-neuf ans et huit mois de prison.
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corps de Nicole Kritter avait été retrouvé par 6 m de fond dans le canal, trois semaines après sa disparition à Mulhouse
Et aussi ici ya plein de gens que je croise a pied qui parlent tout seuls